Lettre ouverte conflit d'intérêt à la CNCDH et respect de la CDPH
lettre adressée à Monsieur le président de la CNCDH (Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme) et Madame la secrétaire générale
CDPH = Convention des Nations Unies relative aux Droits des Personnes Handicapées
Objet : Conflit d’intérêt à la CNCDH et respect de la Convention des Droits des Personnes Handicapées
Monsieur le Président, Madame la Secrétaire générale,
Ce lundi 16 août 2021 se tenait en ligne la réunion privée avec le Comité des Droits des Personnes Handicapées de l'ONU, sur l'implémentation de la Convention relative aux droits des personnes handicapées en France.
Lors de cette réunion, qui rassemblait des associations représentatives des personnes directement concernées, des associations de proches, et des organisations rassemblant majoritairement des associations essentiellement gestionnaires, nous avions comme information que la Secrétaire générale de la CNCDH devait s'exprimer au nom de cette instance.
Quelle ne fut notre surprise de découvrir que c'est la présidente de l'APF France handicap (titre énoncé lors de sa prise de parole) qui s'est exprimée au nom de cette instance.
C'est pourquoi nous nous permettons de rappeler un certain nombre d'éléments :
- Selon son site, la CNCDH (Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme) est une structure de l'État qui assure en toute indépendance, auprès du gouvernement et du parlement, un rôle de conseil et de proposition dans le domaine des droits de l'homme, du droit et de l'action humanitaire et du respect des garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques. Elle est assimilée à une autorité administrative indépendante. Elle fonde son action sur 3 grands principes : l'indépendance, le pluralisme, et la vigilance. Elle a pour mission de veiller en France au respect des engagements internationaux de la France.
- La France a ratifié en février 2010 la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Elle a par ailleurs mis en place en 2011 un mécanisme indépendant de promotion, de protection et de suivi de l’application de la Convention. Le Défenseur des droits assure cette fonction, en collaboration étroite avec la CNCDH et le CNCPH (Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées).
- L'Association des Paralysés de France, association loi 1901 devenue APF France handicap, est une association gestionnaire de 428 établissements et services médico-sociaux destinés aux personnes handicapées et 25 entreprises adaptées (données du rapport 2019). Elle a perçu en 2019, à ce titre, 616 millions €, qui représentent près de 80 % de son budget, la rendant, de ce fait, dépendante de l’Etat et ses subventions.
- Selon le rapport du 8 janvier 2019 de la Rapporteure spéciale de l’ONU en charge du handicap suite à sa visite en France :
"Bien qu’elles diffèrent par leur taille, leur dénomination et leur organisation, ces institutions restreignent toutes la liberté des personnes handicapées, les séparent et les isolent de la collectivité, leur ôtent le choix et le pouvoir de décision en matière de lieu de vie et de mesures d’assistance, et les restreignent considérablement dans leur prise de décisions au quotidien.
Des parents qui s’opposent au placement de leur enfant handicapé en institution sont victimes d’actes d’intimidation ou de menaces et, dans certains cas, perdent la garde de leur enfant lorsque celui-ci est placé en institution de force ou fait l’objet d’un placement administratif.
Malgré ces données inquiétantes, la demande de places en établissements d’accueil dépasse l’offre existante et continue d’augmenter. Ceci s’explique par l’incapacité du Gouvernement à assurer l’indépendance des personnes handicapées dans d’autres lieux de vie, y compris suffisamment de services d’appui de qualité dans les villes et les communautés où elles vivent, et par le défaut de sensibilisation aux droits des personnes handicapées de vivre de façon autonome dans la société. Il en découle qu’à l’heure actuelle, au moins 6 500 personnes handicapées, dont 1 500 enfants, sont ainsi placées dans des établissements d’accueil en Belgique, loin des membres de leur famille et de leurs amis. Des mesures doivent être prises d’urgence pour remédier à cette situation et trouver en
France des solutions à long terme, adaptées et fondées sur les droits de l’homme."
"La Rapporteure spéciale insiste sur le fait qu’il n’existe pas de « bon établissement d’accueil », puisqu’ils imposent tous un certain mode d’existence qui limite les possibilités de vivre une vie agréable sur la base de l’égalité avec les autres. Les personnes handicapées, y compris celles qui nécessitent beaucoup de soins, doivent avoir la possibilité de vivre en société, et de choisir leur lieu de résidence et les personnes avec lesquelles elles vivent."
"La Rapporteure spéciale demande instamment au Gouvernement d’adopter un plan d’action concret pour fermer progressivement tous les établissements existants et transformer le marché actuel de l’offre de services aux personnes handicapées en une offre de services de proximité, notamment en matière de logements adaptés. La désinstitutionalisation des enfants handicapés devrait être une priorité et le
Gouvernement devrait sérieusement envisager d’établir un moratoire sur les nouvelles admissions."
Comment, dans ces conditions, a-t-il été possible que la présidente d'une association qui applique une politique qui n'est pas fondée sur les droits de l'homme ait pu prendre la parole devant des instances internationales pour représenter une commission chargée de veiller au respect des droits de l'homme ?
C'est un peu comme si demain, pour assurer la représentation des détenus, la France faisait appel aux surveillants pénitentiaires !
C'est pourquoi nous demandons aux autorités françaises qu'il soit mis fin sans délai à ce conflit d'intérêt majeur.
Ce conflit pose d’ailleurs la question des modes de nomination au sein des instances françaises censées être indépendantes.
Enfin, pour permettre le pluralisme au sein de la CNCDH, nous invitons cette dernière à solliciter les associations réellement représentatives des personnes directement concernées, et donc non gestionnaires.
Dans l'attente, veuillez agréer, Monsieur le Président, Madame la Secrétaire générale, nos salutations les meilleures.
Mireille Stickel, présidente de la CHA
Garance Jacquot, Secrétaire Générale de CLE Autistes et sa direction collégiale,
Odile Maurin, présidente d'Handi-Social
Lettre ouverte à la présidente de la CNSA
Retrouvez ci-dessous le courrier que nous adressons à la Présidente de la Caisse Nationale de Solidarité pour l'Autonomie (CNSA).
Objet : Election au Conseil de la CNSA des représentants de personnes handicapées
Madame la Présidente,
Notre association, la Coordination Handicap et Autonomie – Vie Autonome France, qui siège depuis trois mandats, seize années, au Conseil de la CNSA, tient à vous faire part de son ressenti sur les réunions (qui comprennent le conseil, les commissions et autres réunions de travail).
Lors des réunions organisées par la CNSA, nous ne nous sentons pas à notre place : c'est un entre-soi parisien de représentant(e)s qui se connaissent bien, se côtoient régulièrement et semblent tellement rodé(e)s à se concerter entre eux que tout est décidé en amont. En réalité, les discussions et débats sont très formels et sans conséquences. Et quand nous, personnes directement concernées représentant leurs pairs, prenons la parole, une parole non prévue en amont, non calibrée, on ne nous écoute pas, on ne nous entend pas, on ne nous comprend pas…
Or, membres de la CHA – VA France, nous avons pour mandat de représenter les personnes handicapées, qui sont quand même une partie conséquente des bénéficiaires des actions et financements de la CNSA. Mais, pour autant, nous avons l'impression que le simple fait de porter leur voix, d’exprimer leurs aspirations, de les défendre, dérange !
Et, en réalité, ce que nous entendons lors des réunions, ce sont essentiellement les positions de défense des salarié(e)s du médicosocial et des structures, points de vue professionnels assénés, y compris sur les situations des personnes concernées... et presque jamais LEURS propres opinions directes !
Ces réunions sont, de ce fait, très pénibles, nous l’avons déjà signalé : c'est usant et humiliant de constater que vous n'avez pas d'écoute réelle pour les personnes concernées !
Tout ceci questionne sur la représentation des personnes concernées dans ces instances décisionnaires : en veut-on vraiment ?
L’expérience a montré que, si nous ne mettions pas en œuvre des moyens de pression lourds, on ne nous écoute pas !
POURQUOI ???
Ne souhaite-t-on échanger qu’avec des potiches posées là pour valider le décor ?
Et, dans un contexte de pandémie déjà compliqué pour nous, avec le terme de notre mandat fin juin, nous apprenons le 10 juin dernier qu’un arrêté ministériel concernant le collège électoral de la future mandature des représentants au Conseil de la CNSA nous exclut de candidater à l’élection prévue ce 21 juin.
Ce délai très court, l’absence d’explication, et encore une fois de considération (aucune réponse à notre courriel du 16 juin dernier), nous semblent peu respectueux de nos années d’investissement comme représentant à la CNSA.
Par ailleurs, nous souhaitons solennellement rappeler les termes de l'article 1er de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, article fondateur s'il en est, suivant lesquels :
« Dans toutes les instances nationales ou territoriales qui émettent un avis ou adoptent des décisions concernant la politique en faveur des personnes handicapées, les représentants des personnes handicapées sont nommés sur proposition de leurs associations représentatives en veillant à la présence simultanée d’associations participant à la gestion des établissements et services sociaux et médico-sociaux mentionnés aux 2o, 3o, 5o et 7o du I de l’article L. 312-1 et d’associations n’y participant pas. »
Or, la règle imposée par le gouvernement consistant à limiter la composition du collège électoral des personnes handicapées de la CNSA aux seules associations siégeant au « collège des représentants des associations de personnes en situation de handicap ou leurs familles » du CNCPH nous semble, au regard précisément de cet article de loi, pour le moins problématique.
En effet, à l'issue du scrutin, qu'en sera-t-il des « six représentants des associations œuvrant au niveau national pour les personnes handicapées », désignés par la ministre sur proposition de ce collège électoral, et qui siégeront dans le futur conseil de la CNSA ?
Ce principe fondamental qui vise à ce que la parole des personnes en situation de handicap qui défendent leur droit à l'autonomie soit entendue, en veillant à la présence simultanée d'associations gestionnaires d'établissements et de celles qui ne le sont pas, sera-t-il respecté par la future CNSA ?
Par le passé, et dans le respect de la volonté exprimée par le législateur, les pouvoirs publics avaient veillé à cet équilibre, en donnant la possibilité à des associations extérieures au CNCPH, mais reconnues dans leurs actions au plan national, notamment pour l'accès des personnes concernées à l'autonomie, de faire partie à part entière de ce collège électoral.
Nous constatons, avec regret, que tel n'est pas le cas aujourd'hui.
Soyez assurée. Madame la Présidente, que la Coordination Handicap et Autonomie, qui vient d'être évincée, sans information préalable, après seize ans de mandat, du collège électoral des représentants des personnes handicapées, sera particulièrement vigilante, ainsi que ses partenaires associatifs, sur la légalité à venir de la prochaine composition du conseil de la CNSA.
Veuillez agréer, Madame la Présidente, l’expression de notre considération distinguée.
Pour la CHA – Vie Autonome France,
La Présidente : Mireille STICKEL
Vous pouvez également télécharger ce courrier en PDF.
Soutien à Handi-Social
La CHA veut témoigner son soutien à Handi-Social qui vient de subir un lourd verdict en justice (prison avec sursis, amendes...).
Handi-Social avait organisé des actions militantes pour dénoncer l'inaccessibilité des transports et de la société rendant impossible notre vie autonome.
Après un procès qui ne tenait pas compte des besoins des personnes (toilettes, ascenseurs, aide humaine, aide à la communication), cette parodie de justice indigne des droits de l'homme a confirmé que la société française restait inaccessible....
Pour les soutenir : https://www.helloasso.com/associations/handi-social/collectes/soutien-aux-activistes-d-handi-social
Texte socle : Avez-vous conscience de la réalité du terrain ?
La première des libertés dans une société civilisée est la possibilité, y compris pour les personnes dépendantes, de pouvoir décider de son mode de vie.
Ainsi débute ce texte adressé en novembre 2020 à l’ensemble de nos adhérents et de nos sympathisants. Ce texte « socle » de la CHA est destiné à nous identifier, à nous rassembler autour d’un travail en constante évolution sur un accompagnement de la dépendance qui pourrait devenir … libérateur. Il est aussi amené à évoluer suivant vos retours et réflexions.
Une société civilisée ne peut passer que par la prise en compte (ne parlons plus de « prise en charge ») de la multiplicité humaine. Les maladies, les handicaps, les dépendances, visibles ou pas, font partie intégrante de la vie. À force de les reléguer dans des cases, des grilles, des barèmes, des protocoles sanitaires et médico-sociaux déshumanisants, on a fini par l’oublier.
Où est la « société civilisée » ? Comment notre société peut-elle accepter que la personne dépendante n'ait pas le choix de son mode de vie ?
Texte socle de la CHA : Avez-vous conscience de la réalité du terrain ? [PDF]
Vaccination et aide humaine à domicile
La CHA a adressé le courrier suivant aux autorités de santé :
Bonjour,
La Coordination Handicap et Autonomie regroupe des personnes quels que soient leur âge et leur « handicap », avec le soutien ou non de leurs proches aidants, qui vivent ou qui désirent vivre à domicile, ainsi que des personnes qui résident en institution, souhaitant entamer une démarche d’autonomie. Elle agit pour permettre à tous d’accéder effectivement à l’autodétermination et à la vie autonome par un accompagnement humain individualisé.
Alertés par certains de nos adhérents, très inquiets pour leur santé, nous vous soumettons cette question : dans les programmations des priorités de vaccination contre le COVID-19, a-t-il été pris en compte les particularités des personnes ayant des aides à domicile pour les gestes vitaux de la vie quotidienne ?
En effet, comme vous le savez, de nombreuses personnes ayant besoin d'aide humaine pour les gestes vitaux de la vie quotidienne choisissent de vivre à leur domicile, plutôt qu'en établissement. Or, il est impossible de respecter les gestes barrières contre le COVID-19 et de minimiser les risques quand on doit faire un transfert, une toilette, donner à manger, etc... De plus, notamment en emploi direct, nous n'avons jamais eu accès à des masques FFP2.
Nous souhaitons donc que les salariés à domicile, y compris en emploi direct, et les aidants familiaux, ainsi que les bénéficiaires de cette aide humaine, pour ceux qui le choisissent, puissent avoir droit à un accès prioritaire au vaccin COVID-19, comme c’est ébauché dans les établissements médico-sociaux avec les EHPAD, et ne soient pas encore une fois oubliés des décisions d’urgence : la protection vaccinale des personnes accompagnées et de leurs accompagnants doit pouvoir être assurée rapidement !
Merci de nous tenir informés rapidement concernant cette demande !